« Icônes rémanentes : réécrire l’Histoire par l’image
Dans le cadre de sa résidence artistique Inspiration Bénin, Hakima El Djoudi poursuit son exploration des mémoires visuelles à travers la série Icônes. Puisant dans les archives photographiques, notamment celles de la Fondation Zinsou, l’artiste engage un dialogue avec ces images du passé, souvent marquées par la colonisation, en les réactivant par le biais du transfert, de la peinture et du palimpseste plastique.
Ces œuvres ne sont pas de simples réinterprétations : elles opèrent un processus de réparation et de réinscription historique. En exhumant ces visages anonymes et figés dans un regard imposé par l’Histoire, Hakima El Djoudi leur redonne une présence tangible, une dignité retrouvée. Son geste pictural, à la fois délicat et puissant, désamorce la charge idéologique de l’image originelle pour en révéler une autre lecture, débarrassée des assignations imposées par le regard colonial.

À travers une matière travaillée qui superpose altération et sublimation, l’artiste explore l’ambivalence des images d’archives : à la fois témoins et artefacts, fragments d’un passé dont l’interprétation reste mouvante. La peinture s’immisce dans l’image, recouvre, souligne, efface ou réécrit les corps et les regards, les enveloppe de spirales, de dorures et de motifs vibrants, leur conférant une aura quasi spirituelle. Ces icônes rémanentes, comme des spectres revisités, surgissent à nouveau dans notre contemporanéité, interpellant notre rapport au visible et à l’oubli.
En rendant à ces figures leur statut de sujets, Hakima El Djoudi prolonge une réflexion essentielle : comment l’image façonne-t-elle les récits ? Quels visages de l’Histoire avons-nous choisi d’ignorer ? Dans cette série, chaque œuvre est une tentative de réponse, une résurgence critique et sensible, une mémoire reconquise. »
- Cédric Fioretti Clet
Directeur adjoint du Musée de Vence


